Activités scientifiques

Les besoins et l'offre de répit en Rhône-Alpes

 

 

Synthèse de l’étude réalisée par le CREAI Rhône-Alpes, à la demande de la Fondation France Répit, financée par la Fondation April et la Fondation Bullukian (mars 2015).

 

Contexte national et régional

La situation des aidants est une préoccupation grandissante, notamment au regard de l’allongement de la durée de vie pour l’ensemble de la population, et plus spécifiquement pour les personnes malades et/ou en situation de grande dépendance.

S’il n’y a pas de données chiffrées permettant de recenser de manière précise les aidants en France, ni dans la région Rhône-Alpes, l’enquête Handicap Santé réalisée par la DREES en 2008, estime, en France, à 8,3 millions de personnes de 16 ans ou plus qui apporteraient une aide de façon régulière et à domicile, à un ou plusieurs de leur proche pour des raisons de santé ou de handicap. Cela représenterait plus d’un adulte sur sept.

Au regard de cette estimation, on peut estimer que les aidants dans la région Rhône-Alpes représenteraient environ plus de 830 000 personnes.

De plus, si tous les aidants ne sont pas sollicités de la même façon, une étude réalisée en 2008 par l’IFOP à la demande de la MACIF, estime à 20% le nombre d’aidants apportant une aide supérieure à 50 heures par semaine, ce qui représenterait environ 160 000 personnes dans cette situation dans la région.

Face à l’énergie déployée par les aidants pour accompagner leur proche, les stratégies d’ajustement et les systèmes familiaux mis en place par ces aidants pour leur permettre de tenir, une question se pose : comment les soulager pour leur permettre d’accompagner leur proche vivant au moins partiellement à domicile, dans la durée, en garantissant à chacun le meilleur accompagnement ?

 

Résultats de l’étude

Il est primordial de décrire en amont le rôle des aidants qui s’inscrit dans leur quotidien, pour ainsi comprendre les répercussions que cela engendre dans l’ensemble des domaines de vie, et par conséquent les besoins des aidants.

Ainsi, il est ressorti du discours des aidants et des professionnels rencontrés la grande multiplicité de rôles qu’un aidant peut être emmené à endosser au cours d’une même journée, parfois même de manière inconsciente. En effet, les aidants peuvent être contraints de remplacer les professionnels intervenant auprès de leur proche, et par conséquent à réaliser une multitude de tâches, à savoir des tâches d’infirmière, d’assistante sociale, de juriste, de psychologue, d’employeur, de superviseur et surtout de l’ensemble des acteurs intervenant auprès de la personne malade.

La diversité de ces tâches n’est pas sans conséquence sur la vie de l’aidant, entraînant un retentissement dans tous les domaines de vie, avec une situation où « toute la vie change » (citation d’aidant). L’accompagnement de son proche au quotidien peut entrainer, au fil du temps, un épuisement physique et psychique de l’aidant. En effet, cette situation peut conduire à un rétrécissement de la vie sociale de l’aidant et de l’aidé, un débordement du rôle d’aidant sur l’ensemble des activités de la famille, un renoncement quant à l’exercice d’une activité professionnelle…

Cet équilibre fragile peut conduire à un état d’épuisement général de l’aidant, ayant pour risque majeur un « effet de bascule », modifiant la perception que l’aidant a de son propre rôle, le jugeant non plus seulement lourd, mais trop lourd.

Cette organisation du quotidien étant tellement précise et minutieuse qu’un « simple grain de sable » peut la mettre à mal. Tout l’équilibre s’en trouve alors bouleversé et une nécessaire réorganisation du quotidien va s’imposer.

Face à l’inscription de cet accompagnement dans la durée, il apparaît nécessaire que l’aidant et son proche puissent avoir des moments de répit. Suite à l’analyse des données empiriques recueillies auprès des aidants et des professionnels, le répit a été défini comme une pause dans un quotidien centré sur la nécessaire aide à apporter à son proche, comme un temps où l’aidant peut se ressourcer et avoir du temps pour soi.

Si les besoins et réponses doivent être diversifiés, le critère commun et fondamental demeure la régularité d’accès à une offre. Il est souhaité par les proches aidants, et constaté par les professionnels, la nécessaire souplesse et diversité des offres pouvant conduire à des moments de répit. En effet, les offres proposées doivent pouvoir permettre des moments de répit pour des périodes courtes et occasionnelles (et ainsi permettre aux aidants de s’absenter pour des événements familiaux, des rendez-vous …) ; pour des périodes courtes et régulières (à l’image du weekend) ; pour des vacances (permettant une solution d’accueil plus long avec ou sans la personne aidée) ; pour des situations en urgence, non planifiées (hospitalisation de l’aidant, épuisement).

Le répit doit être pensé dans une approche systémique, en prenant en considération tout l’environnement du couple aidant / aidé et en accompagnant les aidants et les familles tout au long du parcours de soins de la personne malade et / ou en situation de handicap.

Il apparait primordial de sensibiliser les familles au répit dès le début de la prise en charge de leur proche, et ainsi répondre au besoin avant qu’il ne relève de l’urgence (il est constaté par les professionnels la situation d’urgence dans laquelle s’inscrit la première demande de répit, notamment lorsque les familles n’y sont pas sensibilisées).

S’il existe des solutions favorisant des temps de répit dans la région Rhône-Alpes, il a été constaté une méconnaissance des dispositifs médico-sociaux actuels permettant d’offrir du répit, tant par les aidants eux-mêmes que par les professionnels travaillant auprès de ces aidants (qu’il s’agisse des professionnels du secteur médico-social ou sanitaire).

A cette absence de visibilité vient s’ajouter le manque de diversité dans les solutions proposées et adaptées pour favoriser des temps de répit, notamment un manque de solution pour du relais à domicile ou pour de l’accueil temporaire dans les établissements médico-sociaux pour des motifs de répit de l’aidant.

De plus, si l’offre proposée est insuffisante, les réponses apportées sont aussi parfois inadéquates, notamment pour les personnes en situation de grande dépendance, nécessitant des soins techniques (constat partagé par les professionnels et les familles). En effet, faute de solution, des familles ont relaté des expériences les ayant conduites à avoir recours à des séjours en milieu sanitaire (services hospitaliers ou services de SSR), pour des motifs de répit alors que l’état de santé de leur proche ne le nécessitait pas directement.

 

Préconisations

Face à l’ensemble de ces constats partagés, il est primordial de développer une offre qui soit souple, diversifiée et graduée afin d’éviter les ruptures de prise en charge en favorisant la fluidité des parcours, tout en s’adaptant aux besoins des familles. Pour y parvenir, il est nécessaire de :

  • Développer des solutions de répit au domicile des personnes en situation de grande dépendance, notamment via des dispositifs de baluchonnage et de service à la personne (en travaillant sur la confiance mutuelle entre les différents professionnels),
  • Développer des réponses d’accueil temporaire, pour des motifs de répit, ou des places d’accueils de jour, à proximité du lieu de vie des personnes (en s’appuyant sur les établissements désirant s’inscrire dans cette démarche),
  • Développer des réponses expérimentales pour des personnes dont la situation de dépendance requiert la présence d’un personnel médical spécialisé.

Afin d’apporter la réponse la plus en adéquation à la demande des familles, il semble pertinent d’inscrire ces différentes offres de répit dans un dispositif régional, pour permettre :

  • Une interdisciplinarité entre les différents acteurs concernés, en dépassant les frontières des disciplines et ainsi créer une synergie autour d’une même problématique.

Cette interdisciplinarité doit être impulsée collectivement, et ne peut se concevoir sans un espace la portant.

  • Une coordination des interventions, tant de façon synchronique que diachronique, afin d’éviter les ruptures des prises en charges qui sont aujourd’hui constatées, et permettre une amélioration de la fluidité des parcours.
  • La création d’un lieu ressource permettant l’organisation de formations à destinations des professionnels et / ou des aidants, et favorisant un partage de formation et une pairémulation entre aidants.
  • La réalisation d’une évaluation de la situation de l’aidant et de l’aidé, dans sa globalité,
  • avec une réactivité nécessaire à la situation.

Par sa reconnaissance au niveau régional, une Plateforme régionale de répit pourrait recenser et rendre visible l’ensemble de l’offre existante et des initiatives en cours de réflexion dans la région, et permettrait ainsi de mettre en œuvre la solution la plus en adéquation possible à la demande de la famille.

Cette organisation doit être garante d’une prise en charge souple et adaptée à chaque situation, en pensant la création d’une Plateforme régionale de répit, multidimensionnelle, qui pourrait être un pôle de services et de ressources qui fasse place à l’interdisciplinarité ainsi qu’à la cohérence et à la coordination des réponses apportées.

 

Diapositive1 (1)

Télécharger l'étude "Les besoins et l'offre de répit en Rhône-Alpes pour les proches aidants de personnes en situation de grande dépendance.

Voir le site du CREAI Rhône-Alpes : www.creai-ra.com

Voir le site des Fondations April et Bullukian www.fondation-april.org et www.bullukian.com/bullukian_fr